Blog - Comprendre et bien pratiquer l’entraînement fractionné en course à pied

L’entraînement fractionné est un pilier fondamental de la progression en course à pied. Pourtant, il demeure l’un des aspects les moins bien compris et parfois délaissé par les coureurs. Longtemps réservé à l’élite, le fractionné s’est démocratisé, tout en restant sous-utilisé ou mal exploité par de nombreux amateurs. Retour sur ses bienfaits, son histoire, ses différentes formes et ses bonnes pratiques.

Qu’est-ce qu’une séance de fractionné ?

Une séance de fractionné consiste à alterner des phases d’effort et des phases de récupération. Contrairement à une sortie en endurance continue, le fractionné découpe l’effort en répétitions, permettant de travailler à des intensités plus élevées sans y rester trop longtemps.

Il peut être pratiqué à toutes les intensités (aérobie, seuil, VMA) et sur tous types de terrain : piste, route, nature. Ce qui le définit, c’est avant tout cette alternance effort/récupération, peu importe la distance, la durée ou la vitesse.

Pourquoi faire du fractionné ?

Le fractionné s’adresse prioritairement aux coureurs ayant une volonté de progression, qu’elle soit liée à la performance, à la santé ou à la perte de poids. Il permet de :

  • Améliorer la capacité cardiovasculaire.
  • Développer la VMA (vitesse maximale aérobie).
  • S’adapter à des allures spécifiques à une compétition.
  • Brûler plus de calories dans une logique de perte de poids.
  • Stimuler l’organisme de manière différente pour éviter la stagnation.

Même en dehors de la recherche de performance, varier les intensités reste bénéfique pour la santé globale.

Une histoire récente et une science en constante évolution

Le fractionné est une méthode relativement récente dans l’histoire de la course à pied. Son origine remonte aux années 1910, avec le Finlandais Hannes Kolehmainen, qui fut l’un des premiers à découper ses entraînements en séries. Il sera suivi par Paavo Nurmi, autre légende du demi-fond, puis par Emile Zatopek, qui démocratisa cette méthode dans les années 1950 avec ses fameux « 100×400 m ».

Dans les années 1940, un cardiologue allemand, Hans Reindell, introduit le terme « interval training » dans un cadre médical. Cette approche sera ensuite adoptée par les coureurs, donnant naissance à des protocoles de plus en plus structurés et fondés sur des bases scientifiques.

Le fractionné : un outil polyvalent aux formats multiples

Il existe une infinité de formats de séances de fractionné. Le choix dépendra de la filière énergétique que l’on souhaite travailler (aérobie, anaérobie, VMA), de l’objectif de l’entraînement, du niveau du coureur et de la période dans la saison.

Voici quelques exemples :

  • 30/30 : 30 secondes d’effort à haute intensité suivies de 30 secondes de récupération active.
  • 10 x 400 m : répéter une distance courte à une intensité VMA, avec une récupération entre les répétitions.
  • 6 x 1000 m : travail spécifique à allure 10 km ou semi-marathon.
  • Fartlek : version libre et non normée du fractionné, alternant allures en fonction du terrain ou des sensations.

L’erreur fréquente chez les coureurs amateurs est de se cantonner à un seul type de séance, souvent entendu ici ou là (le fameux 30/30), sans en comprendre l’objectif ni chercher à varier les formats.

Adapter la récupération : passive ou active ?

La phase de récupération est un levier essentiel dans le fractionné. Elle influence directement la difficulté de la séance et la filière sollicitée.

  • Récupération passive : arrêt complet ou station debout. Elle permet de maintenir une haute qualité de l’effort sur la durée (idéal pour le sprint ou les séances très intenses).
  • Récupération active : trottinement léger ou marche. Elle augmente le volume total de la séance, maintient le cœur à un niveau d’activation élevé et permet un travail métabolique plus soutenu.

La récupération, qu’elle soit passive ou active, doit être choisie en fonction de l’objectif de la séance. Travailler à VMA ou en allure spécifique semi n’implique pas le même besoin de repos. L’enjeu est d’adapter l’intensité de la récupération pour respecter le stress physiologique voulu.

Bien doser pour mieux progresser

Le principe fondamental d’une bonne planification d’entraînement repose sur la progressivité. Il ne s’agit pas de répéter éternellement les mêmes séances, mais de les faire évoluer.

Il est possible de jouer sur :

  • Le nombre de répétitions (passer de 8 à 10 x 400 m).
  • Le temps d’effort ou de récupération.
  • L’intensité des fractions.
  • La nature de la récupération (active ou passive).
  • La structure (progressif, pyramidal, dégressif…).

La progressivité doit être pensée sur plusieurs semaines. Elle permet d’éviter la stagnation, d’améliorer l’efficacité de l’entraînement et de limiter les risques de blessure.

Le fartlek : entre liberté et efficacité

Né dans les années 1930 en Suède, le fartlek (« jeu de vitesse ») repose sur des variations d’allure libres selon l’envie, le terrain, ou les sensations du moment. C’est une forme de fractionné non-structurée, idéale pour sortir de la rigidité des séances sur piste.

Aujourd’hui, de nombreux coachs structurent ces séances en gardant une part de liberté : par exemple, 3 blocs de 10 minutes avec variations d’allure à l’intérieur, mais sans contrainte stricte.

Le fartlek est particulièrement adapté aux périodes de reprise, ou comme séance d’intensité plus légère après une course ou un bloc d’entraînement exigeant.

Piste ou nature : où faire son fractionné ?

La piste d’athlétisme offre un environnement parfaitement normé, idéal pour la précision des vitesses et des distances. Mais elle n’est pas obligatoire. Il est tout à fait possible de faire son fractionné sur route, sur les quais, ou même en forêt à condition d’avoir des repères (montre GPS, marquages au sol…).

Le choix dépendra :

  • Du type de séance (allure spécifique ou non).
  • Du besoin de précision.
  • Du confort et des préférences du coureur.

À noter : utiliser des pointes d’athlétisme n’est pas recommandé pour les débutants. Elles sollicitent fortement les mollets et la chaîne postérieure, ce qui peut entraîner des blessures.

Combien de séances par semaine ?

Le nombre de séances de fractionné doit être calibré selon le volume total d’entraînement hebdomadaire :

  • 3 sorties par semaine : 1 seule séance de fractionné.
  • 4 à 5 sorties par semaine : 2 séances (courte + longue).
  • 6 sorties ou plus : jusqu’à 3 séances avec de l’intensité.

L’important est de toujours espacer les séances intenses par des jours de récupération ou d’endurance fondamentale.

Bien définir ses allures de travail

Travailler avec précision demande de connaître ses allures cibles. Pour cela, plusieurs méthodes :

  • Utiliser un calculateur d’allures en ligne basé sur un chrono récent.
  • S’appuyer sur des tests VMA.
  • Adapter en fonction des sensations, avec la méthode RPE (ressenti de l’effort).

Chaque séance doit avoir un objectif précis : travail de la VMA, de l’allure 10 km, du seuil, etc. Aller plus vite que l’objectif n’est pas souhaitable : cela change la nature de la séance et augmente les risques de surentraînement.

En résumé : les clés d’un fractionné efficace

  • Le fractionné est un outil central pour progresser, à condition d’être bien utilisé.
  • Il existe une infinité de formats : varier les séances est essentiel.
  • Récupération active ou passive ? Cela dépend de l’objectif de la séance.
  • La progressivité est la clé de la progression à long terme.
  • Connaître ses allures cibles permet de structurer efficacement son entraînement.
  • Le fartlek, la piste, la route… tout est bon, à condition d’être cohérent avec son objectif.